Depuis une quinzaine d’années, l’intensification des fouilles et des prospections sur le territoire actuel du royaume hachémite de Jordanie suscite un accroissement important de la documentation épigraphique dans toutes les langues et écritures utilisées entre la conquête du Proche-Orient par Alexandre le Grand et les premiers siècles de l’islam (grec, latin, araméen, nabatéen, christo-palestinien, dialectes nord-arabiques, arabe). La relance par le laboratoire Hisoma du programme des IGLS en Jordanie (Inscriptions de la Jordanie) accompagne cet essor depuis 2013, en particulier grâce au soutien de l’Institut français du Proche-Orient (Ifpo), éditeur du corpus. Par leur abondance, leur diversité et leur fragilité, les inscriptions antiques et médiévales de la Jordanie constituent un patrimoine aussi précieux que menacé, à l’heure où le Proche-Orient connaît des bouleversements dramatiques. Sans elles, des pans entiers de l’histoire du pays resteraient méconnus. Trop souvent, ces textes sont pourtant étudiés de façon cloisonnée, en fonction des intérêts historiques et des compétences linguistiques des chercheurs.
Un colloque international organisé à Lyon les 15 et 16 juin 2017 et conçu en étroite collaboration avec l’Ifpo visait à dresser un bilan en réunissant les acteurs des institutions concernées (Department of Antiquities, universités et centres de recherche) afin de mesurer les avancées et de présenter les résultats des recherches récentes, tant pour débattre des documents nouveaux et de leur apport historique que pour discuter des méthodes de publication des corpus épigraphiques. Ce colloque faisait suite aux journées IGLS de 2015 sur l’épigraphie grecque et latine au Proche-Orient (Jordanie, Liban, Syrie), dont les actes ont paru en 2016 dans le numéro 93 de la revue Syria. Grâce à des subventions de l’Agence universitaire de la francophonie (AUF), du laboratoire Hisoma, du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) – par l’intermédiaire de son appel d’offre pour la Jordanie –, de l’Université Lumière Lyon 2 et de l’Ifpo, il a permis de réunir à la Maison de l’Orient et de la Méditerranée l’équipe des Inscriptions de la Jordanie, ainsi que des chercheurs venus d’Europe et du Proche-Orient, autour de Véronique Chankowski, alors directrice du laboratoire Hisoma et directrice du programme des IGLS.
Le colloque de Lyon a fourni une occasion unique de faire dialoguer non seulement les historiens de l’Antiquité et du Moyen Âge, mais aussi des épigraphistes hellénisants et latinisants avec des spécialistes des inscriptions sémitiques. Il a aussi favorisé la diffusion de l’information, notamment auprès des doctorants et des étudiants de Master qui fréquentent les séminaires d’épigraphie de l’Université de Lyon. La présentation de textes inédits et de séries documentaires méconnues a enfin permis de poursuivre la réflexion sur l’édition des recueils d’inscriptions, en tirant parti de l’expérience acquise par le laboratoire Hisoma dans le domaine des humanités numériques. Le dernier volume de la revue Topoi (22, 2018), paru en décembre 2019, réunit une partie des communications de juin 2017. Sans prétendre à l’exhaustivité, ce dossier édité par Julien Aliquot, Pierre-Louis Gatier et Jean-Baptiste Yon (CNRS, Hisoma/Ifpo) témoigne de la richesse des travaux en cours et du dynamisme actuel des recherches épigraphiques en Jordanie.
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